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mardi 2 février 2010

La Méthode Burton

Le professeur Burton n’était pas une personne susceptible de mourir dans des circonstances violentes. D’ailleurs, il n’était pas susceptible de mourir tout simplement, si ses travaux auraient pu être reconnus à leur juste valeur, ils auraient assurés à l’homme une gloire éternelle, et on aurait étudié son travail des siècles après sa mort.

Mais pourtant, le professeur Cliff Burton était bel et bien mort, sous mes yeux et de la plus horrible façon que l’on puisse imaginer. J’était en effet son apprenti, et si je pose ce récit sur papier, c’est pour être sur qu’il parviendra bien à quelqu’un, que l’on puisse témoigner que je ne suis pas fou.

Je n’ai rien imaginé. Et j’ai peur pour mon âme.

Le professeur Burton étudiait la psychologie des rêves, étant persuadé que ceux-ci reflétaient nos difficultés réelles. Il était convaincu que si, d’une façon ou d’une autre, les obstacles symboliques rencontrés lors de nos songes étaient vaincus, notre âme pouvait accéder a autre chose. Bien qu’il ne puisse vraiment savoir ce qu’il se trouvait au-delà. Que se passerait-il si tous les psychopathes, les fous dangereux, les violeurs et les pédophiles étaient libérés de leurs démons intérieurs ?

C’était l’expérience du professeur.

Grâce à mon aide et aux ressources financières du laboratoire, il fabriqua ce prototype de machine, cette chose tentaculaire censée représenter nos songes sur un écran vidéo. Il nous fallu des années de dur labeur pour mettre au point un tel objet. Le professeur Burton en avait trouvé les plans dans des ouvrages scientifiques, et les avaient complétés. Technologiquement je n’avais jamais vu son égal, mais Cliff, lui, semblait sûr de son projet. Voila une chose qui semblait réellement le motiver.

Il faut avant tout que je vous parle de Cliff Burton. Bien qu’étant un chercheur ingénieux et un scientifique surdoué, l’homme était également un être torturé. Lecteur assidu de Robert Howard, de Freud et de tout un éventail d’auteurs de tout horizons, le professeur avait grandi seul. Orphelin dès son plus jeune age, il avait du passer par un père adoptif le battant, un viol et plusieurs tentative de suicide.
Le destin semblait s’acharner sur lui mais son expérience n’en était que plus glorieuse. Un homme ayant tant souffert aller révolutionner le monde entier grâce à son étude des rêves. Si j’avais pu prévoir une seule seconde la tragédie qu’allait entraîner notre machine je l’aurais brûlée sur le champ.

Une fois celle-ci terminée, Cliff se mit au travail. Assis sur le siège du patient, relié a cette infernale invention a l’aide de sondes collées au crâne, Cliff étudia ses rêves. Il semblait croire que nous avons tous un rêve récurrent, noyé au milieu de centaine d’autre. C’était précisément ce rêve là qu’il voulait décortiquer.

Il le trouva, le localisa et s’attela à la tache deux mois seulement après la première mise en route de la machine. C’était réellement saisissant. La machine retranscrivait précisément sur l’écran ce que mon ami voyait dans ses rêves.
Son rêve récurrent était simple. Un homme en armure, portant une épée, se trouvait devant un immense donjon abandonné. Il s’y dirigeait, mais en chemin rencontrait un immense troll et se faisait déchirer par le monstre. Dieu m’est témoin, ce Troll, infâme, possédait les traits du visage du père adoptif de Cliff. Si bien que j’en fus horrifié.

Le professeur m’expliqua, amusé par ma réaction quand je vis la scène, que ce monstre représentait probablement le premier obstacle. Comme dans un jeu vidéo, il nous fallait franchir, ennemi après ennemi, le décor jusqu'à l’objectif final.
Il rajouta que la plupart de nos rêves sont très violents, ou très osés. Que nous ne nous avouons jamais réellement ce que nous rêvons, notre morale répudie certaines facettes de notre personnalité.
Grâce a la machine, nous pourrons enfin accéder a la personnalité entière de l’homme, ce qui semblait le faire jubiler.

Mon travail se résumait à noter ce que je voyais sur l’écran avec l’aide de Cliff, le sustenter et entretenir la machine. Le chevalier - que Cliff nomma Helgui - semblait toujours vaincu par le troll. Même si, je l’avoue, il me semblait que certaines passes d’armes changeaient au fur et a mesure. Cliff apprenait a maîtriser son rêve. Il essayait de feinter son adversaire, c'est-à-dire, son propre subconscient.

Plongé entièrement dans son expérience, Cliff ne bougeait plus de son fauteuil. Il ne se levait plus, sauf pour uriner, ne mangeait pour ainsi dire plus (le snack du coin fit soudainement fortune) ne se lavait plus et n’entretenait plus aucun rapport avec l’extérieur. J’étais son seul interlocuteur, et, même ainsi, j’avais l’impression d’être de trop.

Et un jour ce fut le début de la fin. Un jour, Helgui trouva une passe d’arme, une faille dans la défense du troll. La masse verdâtre du géant tomba au sol. Helgui cracha sur son cadavre et se dirigea vers le donjon, sous les cris hystériques de Cliff, qui avait oublié jusqu'à mon existence.

Helgui évolua sous le ciel gris vers une porte inaccessible depuis tant d’années. Il frappa au début mais sans que personne ne daigne ouvrir. Helgui, qui était un homme massif, entreprit de la défoncer. Sans aucun succès. Cliff conclut donc que cette porte était probablement le second obstacle, tout en sachant que ce n’était pas le dernier.

-« Il y a une logique dans ce rêve », me dit-il un jour, alors que je ramassais les emballages de sandwichs parsemant le laboratoire.
-« Tout à une logique, ce donjon possède probablement un maître des lieux, quelqu’un qui m’empêche d’accéder au plus haut niveau. Il est sur que si j’y parviens, j’aurais terminé mon expérience. »

Et la porte tint bon, durant un mois. Helgui essayait plusieurs façons de l’ouvrir. Chaque fois que le professeur se rendormait, le rêve recommençait au début, mais le troll n’était plus un obstacle pour le professeur.
Un jour, cependant, elle céda. Sans aucune explication. Cliff lui-même en fut étonné. Peut-être que son inconscience avait décidé de le laisser progresser ?

Helgui monta le long d’escaliers humides et crasseux. Le donjon n’était pas très éclairé. Il rencontra un couple d’orks (qui avaient les traits de sa mère adoptive et de sa sœur.) mais ceux-ci n’offrirent aucune résistance au guerrier.

Le professeur Burton exultait, il ne tenait plus en place, persuadé que son inconscient allait enfin lui livrer les secrets de son âme. Si seulement j’aurais pu deviner ce qui allait se produire, si seulement j’avais su.

Mais Helgui atteignait déjà le haut du donjon, l’ultime porte. Une porte faite d’acier, de chair et de pierre. Elle palpitait, crachant sang et tripes, vomissant un liquide glaireux, semblant éviter l’affrontement avec cet être non désiré. N’importe qui, dans ses rêves les plus fous, aurait évité d’ouvrir cette porte. Sa simple vue me fit vomir et j’avais du mal à me tenir debout.

Mais Cliff était saisi de folie. Je pense que c’est cela plus qu’autre chose qui le perdit. Il fit abstraction de la porte. Il l’ouvrit en rigolant à l’Enfer lui-même… Ô Mon Dieu.

Comment est-ce possible ? Comment cela a-t-il pu se produire ? Le rêve et la réalité se mélangèrent dans cette parodie de tragédie. Helgui « franchit » cette intangible barrière qu’était devenu l’écran de la machine. Helgui sortit de l’écran. Helgui devint réel sous mes yeux devenus fous. Et sous ceux de Cliff, horrifié mais émerveillé a la fois.

Puis, le guerrier le décapita d’un geste assuré. La tête de mon ami roula au sol, dans mon vomi. Avec un grand sourire et une parodie de vie, Cliff continuait à parler dans le vide, privé de cordes vocales, de poumons et de cœur. Néanmoins, ce que je lit sur ses lèvres, ce fut son double qui le prononça en même temps avant de s’évaporer dans cette réalité horrible qui était devenue la mienne. Ce fut lui qui fit débuter cette folie que deviendrait ma vie. Ce fut lui qui conclut ainsi l’expérience.

-« … De cette façon, mon cher collègue, le secret désir de mort du patient est enfin satisfait. Ceci prouve la viabilité de la méthode Burton ».


** Nouvelle réalisée dans le cadre d'un concours Lovecraft**

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